L'Art de la Présence



L’art de la présence


« Lorsque vous sortez de chez vous, accordez pendant quelques secondes votre attention au ciel puis, après une pause, aux mouvements de votre corps. Continuez ainsi à entrer dans la présence et à en sortir consciemment. Soyez présent à un visage, à un regard, à trente secondes d’une conversation où vous écoutez tout l’être qui vous parle et pas seulement ses mots. Si vous parvenez à cette attention légère, ouverte, dans un esprit de jeu, dégagé de toute idée religieuse ou spirituelle, vous ferez dés le premier jour une série de découvertes capitales qui vous aideront à être totalement vivant.

Vous n’avez pas besoin d’être bouddhiste ou tantrikâ, vous n’avez même pas besoin de vous intéresser à la spiritualité. Il ne s’agit que d’une réalité, votre désir d’être au monde, totalement, sans inhibition, sans peur, sans angoisse. Le désir d’être intégralement disponible à la vie suffit. Vous n’avez ni à vous engager, ni à pratiquer, n à croire quoi que ce soit. Les choses ultimes se présentent d’une manière si simple qu’il suffit d’en faire l’expérience par soi-même.

Qu’allez vous découvrir de passionnant ? Vous allez voir que chaque fois que vous allez réussir à saisir la vie dans son immédiateté, votre respiration va se relâcher harmonieusement. Cette sensation va vous apporter un plaisir profond que vous allez ressentir jusqu’à l’intérieur de votre tête. Dix secondes de respiration spontanée, douce et profonde suffisent à déclencher une sorte de flot tiède et vibrant dans votre cerveau et parfois dans tout le corps.

Ensuite vous allez découvrir qu’une vraie présence vous apporte un plaisir sans commune mesure avec l’évènement. La chose la plus  banale, un bol de thé, quelques pas, l’ouverture d’une porte, un regard sur le ciel peut suffire à vous rendre heureux le temps de votre présence et bien après.
Vous allez découvrir que si vous pouvez trouver un plaisir à la présence, votre joie ne dépend plus de circonstances exceptionnelles attendues dans une tension névrotique, mais de la simple réalité, telle qu’elle se présente à vous de secondes en secondes. Vous gagnerez ainsi une autonomie immense par rapport aux plaisirs intenses  que vous attendiez de la vie pour être satisfaits.

Il en découlera très vite que votre quête et votre attente ne seront plus  placés sur des objets hypothétiques et aléatoires mais sur ce que votre expérience vous révèle au quotidien.
Vous allez découvrir que votre corps et votre esprit aiment cette communication à un tel point qu’ils vont s’unir pour vous en demander plus et que la scission habituelle entre le corps et l’esprit va s’atténuer progressivement.

Vous allez vous apercevoir que dans la présence au monde il n’y a pas d’égo, donc pas de séparation, pas de dualité. La panique de n’être rien, qui vous effleure, laissera alors la place à l’expérience qu’être rien c’est accéder à la totalité et que dans cette attention nue vous êtes le monde. Votre corps retrouvera une sensation de plénitude et de calme et même si, au début, cela ne dure que trois minutes par jour cela va changer votre vie à un point que vous n’imaginez pas. » 

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La présence c'est l'union totale avec ce que vous vivez, le sculpteur Rodin l'avait bien compris. Voici ce qu'il dit au sujet de sa sculpture "Le Baiser"

 "Une main qui se pose sur l’épaule ou la cuisse d’un autre corps n’appartient plus tout à fait à celui d’où elle est venue : elle et l’objet qu’elle touche ou empoigne, forment ensemble une nouvelle chose"


 
Et voici le texte entier écrit par son secrétaire et grand poète Rainer Maria Rilke à ce sujet. 

 « De même que le corps humain n’est pour Rodin un tout qu’autant qu’une action commune (intérieure ou extérieure) tient en mouvement tous ses membres et toutes ses forces, de même des parties de corps différents qui, par une nécessité intérieure, adhèrent les unes aux autres, se rangent pour lui d’elles-mêmes en un organisme. Une main qui se pose sur l’épaule ou la cuisse d’un autre corps n’appartient plus tout à fait à celui d’où elle est venue : elle et l’objet qu’elle touche ou empoigne, forment ensemble une nouvelle chose, une chose de plus qui n’a pas de nom et n’appartient à personne ; et il est question à présent de cette chose particulière et qui a ses limites définies. Cette découverte est à l’origine de la manière de grouper les formes, chez Rodin ; ainsi s’explique que les figures soient liées les unes aux autres d’une façon inouïe, que les formes tiennent ensemble, ne se lâchent à aucun prix. Il ne prend pas pour point de départ les figures qui s’étreignent, il n’a pas de modèles qu’il dispose et groupe. Il commence par les endroits où le contact est le plus étroit, comme aux points culminants de l’oeuvre ; là où quelque chose de nouveau se produit il entame son travail et consacre tout le savoir de son instrument aux apparitions mystérieuses qui accompagnent la naissance d’une chose nouvelle. Il travaille, en quelque sorte, à la lumière des éclairs qui jaillissent de ces points, et ne voit que celles des parties du corps entier qui sont éclairées. Le charme du grand groupe de la jeune fille et de l’homme qui se nomme Le Baiser tient à cette sage et juste répartition de la vie ; on a le sentiment que, de toutes ces surfaces de contact, des vagues pénètrent dans les corps, des frissons de beauté, de pressentiment et de force. De là vient que l’on croit voir la félicité de ce baiser sur toute l’étendue de ces corps ; il est comme un soleil qui se lève et sa lumière est répandue partout. »

 



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